ECHO DE ST-PIERRE N° 15, 1989

PAUVRES D’HIER ... ET D’AUJOURD’HUI

La révolution de 1789 fut un tournant dans la lutte contre la pauvreté. Tout au moins au niveau des principes. En effet, à la notion de charité, s’est substitué la notion d’assistance, et à la prise en charge par l’initiative individuelle, la prise en charge par les pouvoirs publics. Mais les moyens ne furent pas mis en place...

Malgré tout, ce fut un souci permanent. Il est d’ailleurs curieux de voir les analogies entre la délibération du Conseil Municipal de St-Pierre Quilbignon du 17 avril 1881, et le contenu du débat actuel sur les problèmes de pauvreté et de la mis en place du RMI, notamment.

Le problème était fort crucial aux siècles derniers. Plus près de nous, en 1906, Brest comptait 85000 habitants, et nous y répertorions 23584 assistés.
Hélas, la misère est toujours d’actualité. En 1975, on estimait à 38 millions dans la CEE, le nombre de personnes au-dessous du seuil de pauvreté; en 1985, il était estimé à 44 millions.
A Brest, on dénombre 1600 bénéficiaires du RMI, mais le nombre de personnes au-dessous du seuil de pauvreté est bien plus important.

Extrait des délibérations du Conseil Municipal de St-Pierre Quilbignon du 17 avril 1881 :
“... Par suite de l’extinction de la mendicité dans les communes environnantes, beaucoup de mendiants de profession, dont l’intérêt n’a pas paru suffisamment démontré aux membres des sociétés de secours de ces communes, viennent se fixer à St-Pierre, et restent ensuite à notre charge, ce qui nous met dans la gêne pour secourir utilement nos propres indigents, avec les
faibles ressources dont la commune dispose.
Nous ne voyons qu’un moyen d’arrêter cet envahissement toujours croissant des mendiants étrangers de notre commune, c’est de prononcer l’extinction de la mendicité, et d’organiser d’une manière large et régulière l’assistance : ce service qui est le plus intéressant de notre administration et que nous impose la solidarité humaine.
D’après les renseignements que nous avons recueillis auprès des administrations des communes voisines, et après avoir condensé tous les éléments qui ont été mis en usage par nos voisins, voici la marche qui nous a paru la plus courte et la plus naturelle pour arriver à un résultat.
Nous rendre, d’abord compte des charges que la commune est dans la stricte obligation d’accepter.
En faisant un recensement des mendiants de profession qui séjournent actuellement dans la commune et, après un sérieux examen de la situation de chacun d’entre eux, dresser une liste de ceux qui méritent d’être assistés.
Ces mendiants devront justifier :
- Qu’ils sont originaires de la commune ou qu’ils y sont domiciliés depuis cinq ans,
- Qu’ils n’ont aucune ressource pour vivre,
- Qu’ils ne peuvent s’en procurer par le travail,
- Qu’ils n’ont aucun parent à qui ils puissent légalement demander des aliments ou qui soit en mesure d’en fournir.
Connaissant alors la somme des besoins, nous rechercherons celle des ressources ...”

Pour beaucoup d’exclus d’aujourd’hui, les promesses et espérances de 1789 (et celles qui suivirent...) paraissent bien lointaines.
Quant à la délibération du Conseil Municipal de St-Pierre Quilbignon du 17 avril 1881, elle est restée étonnamment d’actualité.

J.P MADEC